Comment assurer sa biotech?

Les biotech sont devenues une pièce indispensable du puzzle de la santé, entre la recherche publique et les « big pharma ». Ce sont elles en effet qui permettent de donner corps à des concepts de laboratoires, en agrégeant des talents et des capitaux privés pour les transformer en molécules (ou méthodes, ou dispositifs médicaux, …) commercialisables à large échelle.

On compte plus de 400 entreprises de biotechnologies en France, ce qui signifie qu’il s’en crée plusieurs dizaines par an. La question est : Dans quelles conditions ?

 

Que doit retenir un fondateur de biotech (qui est déjà sur tous les fronts : Locaux, équipe, R&D, financement, …) en termes d’assurances ?

 

Trois leçons simples :

 

La biotech est une entreprise comme les autres

La biotech est une tech

La biotech est .. une biotech

 

1 La biotech est une entreprise comme les autres :

 

Essence-même de la biotech (à la différence de l’ « équipe de recherche »), la biotech est une personne morale, une société qui doit donc de manière basique assurer :

 

11 sa responsabilité civile :

 

Même si la police Responsabilité Civile initiale sera peut-être frustre ou incomplète (simple RC Exploitation), elle doit être présente au premier jour.

 

12 ses locaux, son matériel :

 

Là, ça se complique : Souvent la biotech :

            -sera hébergée dans le labo d’autrui

            -partagera son matériel avec autrui (et utilisera le matériel d’autrui)

 

Il faut ici cerner les priorités, et identifier notamment des équipements-clés, couteux, à protéger en priorité (ex : une HPLC).

 

Pour les matériels, elle retiendra l’idée des contrats « bris de machine » bien adaptés à la protection de matériels neufs, complexes, couteux.

 

13 son dirigeant, son personnel :

 

Compliqué là-aussi : l’entreprise est souvent aussi un assemblage de personnes sous contrats (variés, avec des statuts variés). Pour tout arranger, ces personnels sont fréquemment éparpillés (au début) sur plusieurs sites.

 

Peu importe, il convient de mettre en place ab initio:

 

-pour le dirigeant (président, gérant, …) la prévoyance et la santé

-pour le personnel (même s’il n’y a qu’un employé) une prévoyance et une assurance santé collectives.

 

Responsabilité civile, biens, dirigeant, personnel : la biotech a son équipement de base (d’entreprise « comme les autres »). Mais la biotech n’est pas une entreprise comme les autres : c’est aussi une start-up, une tech !

 

2 La biotech est une tech :

 

Deuxième considération, avant d’être une entreprise de recherche en sciences de la vie, la biotech est une « simple » start-up, c’est-à-dire une très jeune entreprise, avec des méthodes originales de développement. La biotech… est une tech !

 

Plusieurs conséquences :

 

21 Ses dirigeants sont souvent très jeunes :

 

Plus que d’une assurance, c’est surtout de conseils en la matière qu’ils doivent s’entourer.

 

22 Certains voyagent beaucoup :

 

L’entreprise essaime, une première implantation US est définie : l’entreprise met en place un programme d’assurance santé/rapatriement.

 

23 Les dirigeants sont sous la pression de leurs bailleurs de fonds :

 

Leurs financeurs et investisseurs vont très naturellement exiger plusieurs choses :

 

-la mise en place d’assurances-emprunteur à chaque fois qu’ils feront appel au marché bancaire (dette senior mais aussi crédit-baux, crédits-relais,..).

 

Rappelons à ce sujet que la biotech n’est en rien tenue à accepter l’offre d’assurance que lui fait son établissement bancaire (et qu’elle a même vivement intérêt à faire faire un devis par un courtier, l’écart de prix étant sensible).

 

-la mise en place d’une assurance Responsabilité des Dirigeants (RCMS ou D&O) :

 

Complémentaire de la Responsabilité Civile de l’entreprise, cette police protège le dirigeant (et donc indirectement ses bailleurs) contre des mises en cause personnelles (de plus en plus fréquentes).

 

Pas toujours facile à obtenir quand on a quelques mois d’existence et zéro chiffre d’affaire (nous reviendrons sur ce point)…

 

-la mise en place d’une assurance Homme-Clé :

 

Du même type que l’assurance-emprunteur, mais avec ici l’entreprise comme bénéficiaire, cette police permet ici de recueillir des fonds en cas de décès, maladie ou indisponibilité du créateur (par exemple pour mettre en place un manager de transition).

 

On visera ici soit l’obtention d’un capital, soit la dévolution d’une « indemnité journalière » (versée le temps de l’indisponibilité).

 

-le renforcement de l’ensemble des garanties d’assurances :

 

Plus les capitaux octroyés grandissent, et plus le risque des investisseurs est élevé. A fortiori, à l’introduction en Bourse, les autorités et les professionnels de la place vont exiger un programme d’assurance :

            -souscrit auprès de compagnies de premier plan,

            -avec des niveaux de garanties confortables,

programme qui sera d’ailleurs détaillé dans le Document de Référence.

 

24 L’entreprise (souvent) ne fait pas de chiffre d’affaires :

 

La « tech » brûle du cash, c’est-à-dire qu’elle se finance et consomme des ressources, sans production immédiate de CA.

 

C’est le sort de beaucoup de tech, mais est encore plus marqué chez les biotech (dont le cycle de développement est parfois plus long).

 

La conséquence essentielle est que l’assureur… ne comprend rien ! La plupart des polices, des ratios sont assis sur le sacro-saint chiffre d’affaires. Au courtier d’expliquer, et de trouver des solutions différentes (forfaits, assiettes « masse salariale », etc).

 

25 L’entreprise est tournée vers l’international :

 

Nous l’avons dit, les managers voyagent. Très vite, une implantation à l’étranger se dessine.

 

Vigilance ! La plupart des polices sont très « franco-françaises » et ne prévoient que parcimonieusement une activité à l’étranger (sans implantation). Et l’assureur se déclarera souvent impuissant à trouver une solution… La solution : Que le courtier génère une police US par exemple via un broker des Lloyd’s.

 

La biotech est :           -une entreprise comme les autres

                                               -une tech

 

Mais ce n’est pas n’importe quelle tech…

 

 3 La biotech est .. une biotech :

 

Plus qu’une entreprise en démarrage (une start-up), plus qu’une start-up très tournée vers l’innovation, la biotech ambitionne d’agir sur l’innovation dans le domaine :

 

-des sciences de la vie

-du médical

-des molécules

-des ingrédients

-des méthodes d’analyses

-des dispositifs médicaux (medical device)

 

Elle prend donc à sa charge (elle « privatise ») un risque autrefois assumé par la recherche publique, par l’Etat, ses grands organismes : risque vital, environnemental, … qui plus est sur des procédés ou des molécules parfois totalement innovants.

 

Les conséquences en assurance sont de deux ordres :

 

31 RC médicale :

 

La biotech va devoir contracter, auprès d’un assureur spécialisé, une police (assez couteuse) garantissant les dommages pécuniaires qu’elle ferait subir à autrui.

 

Il s’agit d’assurer :

 

-les risques liés à l’exploitation :                  

blessures occasionnées dans un labo tiers à l’occasion d’essais par exemple

 

-la responsabilité civile professionnelle :     

-erreur de protocole

-interprétation erronée de résultats

 

qui pourront être reprochées à la biotech :  

                                                           -par un partenaire (CRO, big pharma,.)

                                                            -par une autorité de santé

                                                            -par un patient

                                                            -par un bailleur de fonds

 

Cette RC médicale qui couvre la société dans son activité courante de développement ne suffit pas en phase d’essais cliniques.

 

32 Assurance Essais cliniques :

 

Les risques spécifiques encourus (molécules nouvelles, testées sur parfois plusieurs pays) ainsi que la réglementation (en France la loi Huriet-Sérusclat (n° 88-1138)) vont l’obliger à mettre en place une police d’assurance ponctuelle (ayant une validité au-delà de la fin de l’essai cependant).

 

Les plafonds de garantie (par patient, par protocole, par essai) vont varier selon :

 -la législation du pays

 -le souhait de la biotech de se couvrir plus ou moins  largement

 

 Le certificat d’assurance correspondant est une pièce essentielle demandée par le comité d’éthique validant la faisabilité de l’essai.

 

Les documents de base demandés pour la cotation sont :

            -la nature de l’essai, de la molécule

            -le protocole

            -la lettre d’information au patient

           -les pays où se déroule l’essai

           -le nombre de centres et de patients « randomisés » par centre

 

 

Conclusion :

 

 La biotech est « un drôle d’animal » par bien des aspects (finalité, organisation, fonctionnement, financement).

 

En assurances, c’est un peu la même chose : son programme d’assurances est un savant mélange de polices tout à fait banales (assurances de locaux par exemple) et de polices très spécifiques (RC médicale, bris de machines, essais, …).

 

Le programme d’assurances de la biotech contribue à sa pérennité et sa crédibilité, vis-à-vis des sphères financières et réglementaires. Elle aura ainsi tout intérêt à utiliser les conseils et les services d’un courtier spécialisé en la matière.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *